Georges Dioudj Ndour

Les mois passèrent si vite que Samba n’eut pas le temps de constater le passage des saisons. En Décembre il eut sa part de l’hiver de Marrakech. Il faisait excessivement froid. Un temps auquel le jeune Peulh ne s’était pas habitué. Il s’était acclimaté à la chaleur de Marrakech qui ressemblait à un degré prés au temps qu’il faisait dans le nord du Sénégal, notamment à Podor vers Juin-Juillet. Mais il ne s’était pas réellement préparé au froid de Marrakech. Il prit néanmoins le temps de s’acheter un chauffage mais c’était la croix et la bannière une fois dehors.
En fin Décembre, la communauté des étudiants Sénégalais de Marrakech réunis sous le nom de l’UGESM 1 organisa un diner suivi d’une soirée dansante pour fêter la nouvelle année. Samedi après-midi, les trois étudiants sont assis au salon de leur appartement en train de regarder un match de football.

- Les gars vous irez au diner de ce soir, il parait qu’il y’aura de jolies filles, dit Pierre.
- Mec, calme ta joie, les filles de l’UGESM sont trop chiantes, en plus elles n’aiment pas sortir retorqua Thierno.
Samba ne dit rien et continua à regarder le match.
- Par contre Samba j’ai vu comment Rougui te regardait lors de la dernière réunion des étudiants . Tu te rappelles Thier 2, la fille qui fait Droit à Cadi Ayyad 3, enchaina Pierre.
Pierre fit un clin d’œil à Thier.
- Ah oui ça sautait aux yeux que la fille était tombé sous ton charme Samba dit Thier.
Samba les regarda un moment et ajouta, sourire aux lèvres.
- Les gars arrêtez votre comédie, je ne sais même pas de qui vous parlez.
Pierre leva les yeux au ciel et se tint debout, devant Samba :
- Oh Samba ne joue pas au sérieux, il faut nous dire que la fille te plait oui. En plus, j’aime bien les rondeurs de la jeune fille, ses lèvres si douces…
- En plus c’est une Peulh comme toi Samba
, coupa Thier, votre union ne posera pas de problème.
Samba prit un cousin du sofa qu’il jeta sur Thier.
- Je ne sais pas pour vous mais moi j’aurai une invitée dit Pierre.
- Ah bon c’est qui bro dis-nous ? J’imagine que c’est la fille de l’Eglise avec qui tu traines au MacDonald les Dimanches après la messe, lança Thierno.
- Ah oui, celle qu’il met souvent dans ses statuts WhatsApp ? Retorqua Samba.
- Bingo bro tu as tout deviné ! Dit Thier. C’est l’ivoirienne qui fait tourner la tête à Monsieur le’’ prêtre-raté’’.
Samba et Thierno éclatèrent de rire. Pierre pris un cousin à son tour et les poursuit dans le salon.

Le soir venu, les trois soignèrent leur mise et se mirent dans leur 31 , pour se rendre au diner . Ils étaient fiers d’eux et voulurent donner aux autres étudiants une leçon de sape. Le taxi jaune s’immobilisa dans une grande salle au quartier Saada. Quelques étudiants s’étaient éparpillés devant l’entrée.
- Ah voici les bleus qui arrivent. Regardez comme ils sont beaux dans leurs costumes héla Saliou près de la porte.
Les trois se sentirent intimidés.
- Encore ce con de Saliou, il va attirer tous les regards sur nous murmura Pierre.
- Il n’a qu’à clouer sa grande gueule, dire qu’il a mis un caftan pour la soirée. Quel manque de gout !
Asséna Thierno, dépité.
Samba ne dit rien et lançait un petit sourire complice.
- Les gars allez y je vais attendre Jacqueline mon amie Ivoirienne, dit Pierre.
- Ah non Pierre ! On entrera ensemble, c’est toi qui nous as forcé à venir, retorqua Thierno.
Tout à coup un taxi vint se garer près d’eux. Une jeune fille, vêtue d’une magnifique robe noire qui faisait sortir ses rondeurs et l’éclat de son teint clair sortit du taxi et fit face aux jeunes étudiants. Du siège arrière de la voiture elle sortit quelques paquets et quelques bouteilles de bissap. C’était Rougui dont parlait Pierre.
- Bonjour les amis comment allez- vous ? Samba tu me donnes un coup de main s’il te plait.
Samba fait semblant de ne rien entendre, Pierre et Thier le poussèrent de sorte qu’il atterrit près de Rougui.
- Voilà, bon débarra, mauviette, lança Pierre.

Rougui confia les bouteilles de bissap à Samba .
- Voilà on va laisser tout ça dans le coin cuisine de la salle. Suis-moi !
Samba eut envie d’étrangler ses deux amis. Il se voyait tourner en ridicule.
- Dés fois je me demande qu’est-ce qu’il a dans la tête. Comment peut-on refuser une telle merveille ? Regarde-moi ces rondeurs Thier, ajouta Pierre !
- En parlant de fille il y’a la tienne qui arrive !Répondit Thierno d’un ton plein d’humour.
Jacqueline arrivait sous sa robe en soie de couleur verte.
- Casse-toi bro lui murmura Pierre !
- Mais où veux-tu que j’aille ?
- Je sais pas . Va voir Saliou !

Thierno roula sa masse longiligne vers le groupe de Saliou pendant que Pierre accueillait son invitée.

A l’intérieur , Rougui transforma Samba en assistant décorateur . Elle faisait parti du bureau de l’UGESM et était responsable de l’organisation. Ensemble ils bouclèrent les derniers réglages de la décoration de la salle sous les couleurs nationales du Vert, Jaune et Rouge. La soirée pouvait démarrer.

Les invités commencèrent à entrer et occupèrent les sièges autour des tables magnifiquement ordonnées. Le diner fut servi. Pierre était assis à côté de sa copine ivoirienne , Thierno était assis avec la bande à Saliou, malgré lui . Quand à Samba, il fut ‘’kidnappé’’ par Rougui. Il était autour d’une bande de filles et devaient supporter leurs fous rires, il faisait semblant d’aimer leurs blagues. Pierre et Thierno en profitaient pour se moquer de lui.

Après le diner, place à la soirée dansante. Samba n’était pas bon danseur, il fut entrainé par Rougui autour d’un cercle où chacun entrait et arpentait des pas de danse sous les rythmes du Mbalakh de Youssou Ndour. Samba pouvait maintenant se lâcher, cela lui rappelait le Yela 4, il commençait maintenant à vraiment s’amuser sous les regards intéressés de Rougui. Il avait intérêt à profiter de ces jours de vacance avant leurs examens. L’ambiance était au rendez-vous et les étudiants étaient déchantés. Rougui ne lâchait pas le jeune Peulh, ce n’était plus un secret : Samba lui avait fait perdre la tête. Le disc joker lançait cette fois-ci le zouk, certains non-initiés se démarquèrent et partirent s’assoir comme des enfants de la maternelle. Rougui s’approcha de plus près de Samba au point où leurs lèvres se touchèrent. A pas lents ils dansèrent au rythme du zouk. Samba se découvrait de nouveaux talents de danseurs. Il sentait l’haleine de Rougui , leurs yeux se fixaient , une alchimie commençait à naitre . Plus tard ils partirent s’assoir, le corps en sueur. Ils avaient apprécié ce moment en commun. Rougui déchirait Samba du regard, elle lui prit par la main et l’entraina dans le coin cuisine de la pièce. La jeune fille, pleine de malice avait l’esprit d’initiative et ne manquait pas de tact. Sans hésiter, elle embrassa le jeune homme sur les lèvres, c’était si doux que le jeune peulh faillit perdre ses appuis. Il se laissa aller cette fois-ci. Ça lui rappelait ses flirts avec sa cousine Raïssa à Podor. Cela faisait des années qu’il n’avait pas ressenti un tel plaisir. Il pouvait en profiter et caressait les seins juvéniles de la jeune fille, arrondis avec des mamelons pointés en direction opposée. Il y’avait un petit écart entre les seins de Rougui. La poitrine de la fille ressemblait à celle de Nicki Minaj 5 tellement elle était bien lotie. En plus, elle embrassait si bien !

C’était le jour des examens. L’amphithéâtre était rempli comme un œuf. Samba et ses deux amis, Pierre et Thierno avait pris le soin de venir tôt pour réserver une place au milieu. Les surveillants passèrent entre les rangées pour distribuer les sujets. L’examen pouvait débuter.
Elle donnait l’air de chercher quelque chose dans son sac. Voilà depuis 5mn qu’elle bougeait de gauche à droite, la tête en sueur et murmurait quelques mots. Ses voisins de table l’ignoraient, préférant se concentrer sur leurs copies. Samba était assis juste derrière elle et remarqua son malaise. D’un réflexe il lui souffla :
-Mademoiselle, vous cherchez un stylo ?
La jeune fille se tourna vers Samba qui lui tendit un stylo, sourire aux lèvres. Contrairement à la jeune fille et aux nombreux étudiants marocains, Samba gardait son calme même si le sujet lui posait quelques problèmes.
- Oh merci beaucoup, lança la jeune berbère aux yeux surréels.
Samba eut du mal à se reconcentrer sur le sujet, tellement il était frappé par la jeune fille qui avait à des yeux de gazelles et une douceur de voix angélique. Son teint café au lait illuminait le jeune Peulh.
- Mec , tu n’écris plus , qu’est-ce qu’il y’a ? lui souffla Pierre.
- Non rien , j’étais en train de réfléchir.
Samba se ressaisit et continua à se creuser la tete pour résoudre l’équation du sujet. Après deux heures d’horloge, les étudiants sortirent de la salle. Samba continua de regarder le jeune fille, oubliant le stylo qu’il lui avait prêter. Celle-ci se souvint de son emprunt et au moment de se lever se tourna vers le jeune homme. Samba eut honte et baissa son regard.
- Merci beaucoup, vous m’avez sauver la vie ! Dit-elle.
- Oh pas de quoi ! Non, vous pouvez garder le stylo, j’en ai plusieurs, retorqua Samba.
- Ah c’est gentil de votre part.
La jeune fille commençait à ranger ses affaires quand Samba reprit :
- Alors vous avez trouvé comment le sujet ?
La jeune vie releva sa chevelure et laissa paraitre les charmes de son coup et de sa poitrine bombée.
- J’avoue que le cours d’anatomie n’est pas ma tasse de thé, en plus de cela je n’ai pas bien révisé pendant les vacances, j’étais dans le sud du pays chez mes parents. Mais ça va alhamdoulillah.

Samba ne cessait de regarder la jeune fille quand elle parlait, l’éclat de sa bouche, ses incertitudes et son français moribond constituaient un charme pour le jeune homme ; au point d’oublier ses deux amis à côté.
- Mec tu viens on doit réviser le cours de biochimie lui lança Thier.
Il se tourna vers la fille :
- On révise dans un café, si tu veux, tu peux te joindre à nous.
La fille réfléchit un moment puis ajouta :
- Bon d’accord. Ça me fera plaisir.
- Super ! Je m’appelle Samba et voici mes deux amis : Pierre et Thierno.
- Enchantée, moi c’est Myriam.
- Enchantés Myriam,
ajoutèrent Pierre et Thierno.
Pierre se tourna vers Samba et lui dit à l’oreille en wolof :
- Mon gars on dirait que tu viens de chiper une Marocaine. Oh tu es efficace frère !
- Oh arrête tes conneries Pierre !

Pierre éclata un rire complice avec Thierno.

Depuis ce jour Samba s’était lié d’amitié à Myriam. Ils s’aidèrent pendant les révisions. La jeune fille ne parlait pas un bon français et préférait s’exprimer en anglais comme la plupart des étudiants marocains. Samba l’aidait à comprendre les cours qui étaient en francais . Elle avait une grande capacité à mémoriser les cours mais avait le défaut de vite les oublier après.
L’examen passé ils gardèrent le contact. Myriam, contrairement aux autres marocains était d’un abord facile, elle aimait la compagnie des subsahariens et avouait avoir beaucoup d’amis subsahariens. En plus de sa beauté, elle était toujours joyeuse et aimait la compagnie de Samba. Petit à petit des sentiments naissaient entre les deux. Bien sûr, Samba était attiré depuis le premier jour mais plus il fréquentait la fille, plus sn amour grandissait. Ils eurent des rendez-vous dans les cafés et autres jardins publics de Marrakech. Ici la loi marocaine interdit les rencontres garçons et filles dans les appartements pour éviter la fornication. Ceci est passible de sanction. Mais ceux-ci enfreignaient la loi et il arrivait que Myriam passât quelques fois dans l’appartement des jeunes étudiants pour discuter avec son ami, réviser ou partager un bon repas avec eux.
Un jour, pendant que le jeune homme était assis avec Myriam, il reçût un appel de Rougui. Depuis la soirée ils ne s’étaient pas revus et Rougui nourrissait le désir de revoir celui avec qui elle avait eu un petit flirt glamour. Samba ne décrocha pas et ignora l’appel. Il savait que ceci aurait des conséquences car connaissant Rougui elle ne lâcherait pas prise et se poserait des questions sur son geste.
Le lendemain, la jeune Sénégalaise débarqua dans leur appartement. Il ignorait comment elle avait fait pour le retrouver. Heureusement pour Samba Myriam n’était pas là. Il joua le jeu et passa un bon temps avec Rougui. Il trouva de bonnes excuses mais se savait dans un dilemme. Qui choisir maintenant entre la douce Myriam et la rugueuse Rougui? Comment gérer cette colleuse de Rougui ? Que faire de son amour pour Myriam ?
Samba était dans un dilemme et devait jouer carte sur table.

(à suivre…)

Légende

  1. Union générale des étudiants et stagiaires Sénégalais à Marrakech
  2. Diminutif de Thierno
  3. Université public à Marrakech
  4. Musique principale des toucouleurs
  5. Chanteuse et compositrice Américaine